Jean 15,12 : « Le Christ dit : “Voici quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés” ».
« Deux personnes regardent à travers les mêmes barreaux : l'une voit la boue, l'autre les étoiles. » Mimmo Langri
(Frère Emiliano)* : Le ciel commence déjà sur cette terre et l'enfer aussi. L'enfer est l'absence d'amour, c'est le manque de regards, de caresses, de baisers, de câlins, de communication : cela crée une solitude infinie. Le ciel est l'étreinte de Dieu et des autres : cela crée un amour infini.
La spiritualité franciscaine est née devant une icône « parlante », celle du crucifix de Saint Damien, avec ses traits byzantins typiques : bras tendus, grands yeux scrutant le cœur avec une immense bonté désarmante et une demande poignante d’être aimé (« L’amour n’est pas aimé ! »). Son visage est un appel silencieux. François sent ses genoux plier devant la marche en pierre et prie : « Dieu Très Haut et glorieux... »· Une prière qui jaillit du cœur, répétée avec insistance et confiance. François se laisse regarder par le visage du Bien-Aimé et ouvre ses yeux sur les merveilles de la Création, ses frères, ses sœurs, l’homme pauvre, le voleur (le loup de Gubbio). François est un homme réconcilié avec lui-même, avec Dieu, avec les autres et avec la Création, car il a changé son regard sur toute sa réalité. Nous aussi sommes appelés à « transformer » le regard obscurci du jugement, du pessimisme, de la mort en un regard de miséricorde, de joie, de vie.
Regarder le monde de bas en haut et vers l’autre, non de haut en bas.
Il est important d’apprendre « à regarder le monde entier avec les yeux transparents d’un enfant » (Pierangelo Sequeri, E sono solo un uomo). On apprend à marcher sur les genoux, signe d’humilité et d’obéissance, qui nous fait voir la réalité différemment. L’Eucharistie nous ouvre à l’étonnement ; mais qu’est-ce que l’étonnement ? C’est regarder la même réalité avec des yeux différents.
La vie est une question de « regard ». Nous vivons comme nous pensons et voyons la réalité. Si nous avons des pensées de mort, de destruction, de pessimisme, nous risquons de vivre ainsi. Bien penser et bien vivre : ce n’est pas une devise psychologique mais spirituelle. Le chrétien a découvert Jésus ressuscité qui a rempli sa pensée de lumière. Cette splendeur de Lumière s’étend du sépulcre vide sur la vie, sur la pensée, sur l’Histoire, sur le monde et sur toute notre réalité.
Déifiés par nature, nous ne pouvons pas être pessimistes, mais optimistes. Les yeux sont le miroir de l’âme, et ce sont précisément les « regards » qui accompagnent notre vie. Pensez aux enfants, aux malades, aux frères « fous »,mais aussi à chaque personne : notre regard aimant et notre attention peuvent faire tant de bien ! Le manque de regards est un véritable manque d’amour.
Quiconque aime voit, écoute, embrasse, caresse, étreint, soigne, éduque, corrige, pardonne, console. Ne perdons jamais l’étonnement et l’émerveillement devant tous les dons que le Seigneur fait dans nos vies. Le secret est de vivre continuellement en amoureux. Ceux qui sont amoureux transforment le temps en un fragment d’éternité, en instants de lumière et en moments uniques. Les yeux amoureux, pleins de lumière, donnent aux gens paix et joie, plus que nos mots.
Le soin d’un regard bienveillant donne sérénité et confiance à ceux que nous rencontrons. L’étonnement nous ouvre à la nouveauté, à la joie, à l’ouverture du cœur et de l’esprit. Pourquoi jugeons-nous ? Par ignorance de l’autre (nous ne le connaissons pas). Nous ignorons l’histoire de sa vie, la « géographie » de ses blessures, le monde mystérieux et complexe dans lequel il évolue, les racines et l’arbre dans lequel il a grandi, la terre où il a été éduqué, la culture dans laquelle a été formée sa vision de la réalité, ses expériences lumineuses et sombres, ses dons et ses limites, ses charismes et sa fragilité. Quiconque ignore, n’aime pas.
Le jugement superficiel sur les gens est un manque d’amour pour eux et aussi pour Dieu. Juger, c’est « salir » le visage de l’autre, qui est l’image et la ressemblance du Visage de Dieu. Voir, observer, regarder, avoir le sens de la réalité est le premier « acte d’incarnation » que nous puissions réaliser dans notre vie.
Un cheminement pour approfondir la connaissance de soi et de Dieu est essentiel. Tous les instruments humains et spirituels sont utiles, mais à la fin, il est important de « nous regarder comme Dieu nous regarde » pour atteindre « l’estime de Dieu », plus importante que l’estime de soi et l’estime des autres. Chaque jour, nous pouvons choisir d’être émerveillés ou stupides. Le stupide vit de superficialité, au lieu de vivre émerveillé par la profondeur. S’émerveiller devant un coucher de soleil, une aube, une « mer » d’étoiles dans le ciel, un morceau de musique, une œuvre d’art ou devant l’innocence des enfants, la sagesse des personnes âgées. Combien d’occasions avons-nous de nous émerveiller ? L’étonnement est comme une contagion qui nous fait voir toutes les personnes et toutes les choses comme nouvelles.
Les saints, les artistes et les poètes sont plongés dans les merveilles du monde, et ils transmettent par leurs œuvres cette « Lumière de Dieu » cachée dans tous les hommes et toutes les choses. La conversion n’implique pas seulement un changement de mentalité, mais bien un changement et une transformation du regard.
Comment vois-tu le monde ? Comment vois-tu Dieu ? Comment vois-tu les autres ? Comment te vois-tu toi-même ? Libère le potentiel d’émerveillement que Dieu a placé en toi et donne avec joie son merveilleux Amour aux autres. L’avare est triste (ainsi Harpagon dans !’Avare de Molière, ou Oncle Picsou), mais la personne généreuse est joyeuse, car en faisant exploser comme une bombe la joie du Seigneur qu’elle porte en elle, elle multiplie chez les autres les « dispositifs de joie et de bonheur ». Pense et vis souvent cette phrase attribuée à Jésus : « il y a plus de joie à donner qu’à recevoir » (Actes 20,35). J’ai lu sur Internet que le 10 mars on célèbre le Day of Awesomeness, la Journée internationale des merveilles, parce que tout ce qui nous entoure chaque jour est merveilleux, sans que nous en soyons conscients.
127 - Le monde peut poursuivre l'homme partout où il partirait se cacher et même dans la solitude et le silence d'un cloître. L'orgueil, les passions et les hypocrisies cherchent à reprendre leurs plus mauvais droits sur l'âme. Alors, se blottir dans le silence et le cœur de Dieu, la bible ouverte sur notre tête comme les ailes de l'Esprit-Saint, reste le meilleur antidote, l'unique nécessaire pour chasser de notre territoire intérieur l'inutile, le superflu, le mondain et jusqu'à notre propre moi.
128 - La tradition monastique appelle « grand silence » le climat nocturne de paix qui doit régner dans l'espace communautaire comme dans celui de chaque cellule, généralement de complies jusqu'à prime, pour être seul à seul avec soi-même et avec Dieu. Mais chaque personne devrait se créer et se construire un cloître intérieur, « un mur et un avant-mur », un désert privé pour y rencontrer Dieu dans la solitude et le silence.
23 - Que deviendra notre monde s'il ne recherche pas des espaces de silence ? Le repos intérieur et l'harmonie ne peuvent découler que du silence. Sans lui, la vie n'existe pas. Les plus grands mystères du monde naissent et se déploient dans le silence. Comment la nature se développe-t-elle ? Dans le plus grand silence. Un arbre pousse dans le silence, et les sources d'eau coulent d'abord dans le silence de la terre. Le soleil qui se lève sur la terre nous réchauffe, étincelant et grandiose, dans le silence. L'extraordinaire est toujours silencieux.
Dans le ventre de sa mère, l'enfant grandit en silence. Quand un nourrisson dore dans son berceau, ses parents aiment à le couver du regard en silence, pour ne pas le réveiller ; ce spectacle ne peut se contempler qu'en silence, dans l'émerveillement du mystère de l'homme en sa pureté originelle.
Prière à notre-Dame du silence
O Marie silencieuse, Toi qui as tout imaginé sans parler, au-delà de toute vision humaine, aide-moi à entrer dans le mystère du Christ doucement et en profondeur, comme un pèlerin brûlant de soif qui entre dans une grotte sombre au fond de laquelle il entend couler de l'eau paisiblement. Fais que, tout d'abord, je m'agenouille pour adorer. Et qu'ensuite, je touche le rocher avec confiance, pour entrer en toute sérénité dans le mystère. Enfin, fais que j’apaise ma soif dans l'eau de la Parole en silence comme Toi. Alors, ô Marie, le secret de ton Fils Crucifié me sera peut-être révélé dans son immensité infinie, et les images et les mots tomberont pour laisser la place uniquement à l'Infini. Amen
Sources utilisées pour le carême 2021
La force du silence, contre la dictature du bruit |
Le chemin du silence, manuel pour ceux qui cherchent le bonheur |
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