La communauté monastique et œcuménique vit de son travail et de son journal écrit. Elle accueille des milliers de jeunes chaque année qui viennent prier et méditer. Frère Roger dit de lui-même : « J’ai trouvé mon identité de chrétien en réconciliant en moi-même la foi de mes origines évangéliques avec le mystère de la foi catholique ».
Au fil des ans se développe la communauté de Taizé. Des compagnons se joignent à frère Roger : la communauté se compose à l'heure actuelle de frères venant d'une trentaine de nations et de diverses origines chrétiennes (dont 70 à Taizé et une trentaine d'autres dans d'autres petites communautés). La communauté n'accepte pour elle-même aucun don. Les frères gagnent leur vie par leur travail : ils fabriquent des poteries, des bijoux (croix de Taizé en pendentif), des vitraux qu'ils vendent dans une boutique située dans la communauté. Leurs héritages personnels sont offerts aux plus démunis. Selon la règle, ils se sont engagés pour la vie, et ont fait vœu d'obéissance au prieur de la communauté.
Les chants de Taizé sont chantés par la communauté priante, avec reprises et traductions en diverses langues. Les célébrations comprennent de longs moments de silence pour la méditation.
La communauté est un subtil mélange – « sans syncrétisme », insistent les auteurs – entre traditions protestante, catholique et même orthodoxe. Piochant dans chacune, elle se construit petit à petit, se donnant d’abord une règle, un habit, puis une liturgie. Travaillée par Frère Max à partir de la tradition, celle-ci est célébrée « d’une manière étonnamment proche de l’Eucharistie des Eglises catholique et orthodoxe »…
Un premier frère anglican, épiscopalien américain, arrive en 1961. Le premier catholique en 1969, avec l’autorisation du cardinal Marty, archevêque de Paris et président de la Conférence épiscopale.
Il y eut des heurts provoqués par cet œcuménisme au quotidien. Ils montrent combien, loin de leur faciliter la tâche, chaque Eglise a poussé les frères à choisir leur camp…
En 1974, quatre d’entre eux sont convoqués à Rome par la Congrégation pour la doctrine de la foi et doivent s’y expliquer longuement sur leur rôle auprès des jeunes catholiques, sur leur loyauté à l’égard de l’Eglise catholique…
Côté protestant, on reproche à Frère Roger ses positions contre le prosélytisme, susceptibles de « briser la progression du protestantisme français », et surtout l’affirmation à plusieurs reprises de la prééminence de l’évêque de Rome, « pasteur universel » et « garant de l’unité des chrétiens ».
En 1975, Taizé est même rayé de l’annuaire de la Fédération protestante de France.
Certains frères vivent dans des lieux défavorisés du monde pour y être témoins de paix, aux côtés de ceux qui souffrent. Dans ces petites fraternités en Asie, en Afrique et en Amérique latine, les frères partagent les conditions d’existence de ceux qui les entourent. Ils s’efforcent d’être une présence d’amour auprès des plus pauvres, des enfants des rues, des prisonniers, des mourants, de ceux qui sont blessés par des ruptures d’affection et des abandons humains.
Cette histoire de la communauté met en évidence combien l’intuition de Frère Roger a mis du temps à s’imposer
« On passe à Taizé comme on passe près d’une source. Le voyageur s’arrête, se désaltère et continue sa route. »
En octobre 1986, lors d’un voyage en Rhône-Alpes, Jean-Paul II décida de faire halte à Taizé.
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